grandlivre.jpgJe n’avais encore jamais lu de livre de Connie Willis. Oui, c’est très mal, mais étant donné que je vais lire une partie de sa bibliographie d’une traite, je suis excusée ! J’ai Sans parler du chien et Black Out qui m’attendent sagement dans ma bibliothèque, mais on m’a conseillé de commencer par Le Grand Livre, parce qu’il parait que c’est chronologiquement mieux. Et j’ai beaucoup apprécié ma lecture, même si je pense que son aspect hybride entre livre historique et science-fiction, ainsi que son rythme très lent, pourront en rebuter plus d’un. Attention à la lecture de ma chronique, je vais spoiler un peu…

Kivrin Engle, jeune historienne passionnée, rêve d’effectuer un voyage au Moyen Age, en 1320. Mais cette période historique est cataloguée risquée par l’Université, et aucun voyage n’y a encore été autorisé. Profitant des fêtes de Noël et de l’absence du recteur, le département d’histoire médiévale planifie ce voyage dans la précipitation. Le directeur de thèse de Kivrin, M. Dunworthy, essaiera sans succès de la faire changer d’avis, inquiet des dangers qu’elle pourrait rencontrer et des problèmes qui pourraient surgir à l’ouverture de la porte temporelle. Mais le transfert est opéré et Dunworthy a eu raison de s’inquiéter… Pendant que Kivrin, perdue dans une forêt, tente de s’orienter, l’Oxford moderne d'où elle vient est frappé par une mystérieuse épidémie…

Chouette, des portes temporelles ! J’ai vraiment apprécié la découverte de ce procédé qui permet aux historiens du XXIème siècle de se rendre à tout moment de l’Histoire, afin de compléter voire de construire nos connaissances. On pourrait penser que cela provoque de nombreux anachronismes, mais le Temps se protège, et une porte ne s'ouvre pas si un paradoxe peut perturber le cours normal de l’Histoire.
C’est sur la base de ce principe que nous suivons le parcours de Kirvrin au Moyen-Age, ainsi qu’en parallèle la vie dans l’Oxford moderne qu’elle vient de quitter. Sept siècles les séparent, mais un lien va les unir : l’épidémie. Et à travers la maladie, la peur et le courage des personnages vont être mis en exergue. Mais si nous ressentons de plein fouet le désespoir de la situation de Kivrin, l'individualité qui règne au XXIème siècle, malgré les morts, nous touchera beaucoup moins...

Et pour cause, Connis Willis s'attache à nous faire découvrir le Moyen-Age dans ses moindres détails. Elle nous en fait vivre les différents aspects quotidiens, les détails domestiques, nous immergeant totalement dans cette période historique, que personnellement je connaissais peu. Ces aspects pris sur le vif sont en plus confrontés aux connaissances théoriques d’historienne de Kivrin, ce qui enrichit d’autant plus notre vision de que pouvait être la vie à cette époque-là.

La seconde moitié du livre m'a particulièrement bouleversée, puisque nous sommes confrontés directement à la peste, et tout ce que cela induit en détails horribles. Cette maladie a décimé la moitié de la population de l’Europe, et ce que vit Kivrin nous confronte directement avec cette dure réalité. La peste a décimé des villages entiers, se répandant à une rapidité incroyable. Les gens prenaient cette maladie comme une punition divine, tant l’hécatombe prenait des dimensions incroyables. C’est une maladie qui en plus n’est pas jolie à voir, ce qui rajoute à sa dimension dramatique.
Quand on se prend à penser à tous ces gens, confrontés à une maladie insoignable, mais qui gardaient tout de même de l’espoir, la foi de croire en Dieu, … J’ai l’impression que ce livre est un peu une sorte d’hommage à tous ces héros anonymes morts depuis sept siècles…
Un grand livre, et une belle leçon d’humanisme.