Un bûcher sous la neige - Susan Fletcher
Par Yume le samedi 11 janvier 2014, 16:42 - Autres - Lien permanent
Au coeur de l'Écosse du XVIIe siècle, Corrag, jeune fille accusée de sorcellerie, attend le bûcher. Dans le clair-obscur d'une prison putride le Révérend Charles Leslie, venu d'Irlande espionner l'ennemi, l'interroge sur les massacres dont elle a été témoin. Mais, depuis sa geôle, la voix de Corrag s'élève au-dessus des légendes de sorcières, par-delà ses haillons et sa tignasse sauvage. Peu à peu, la créature maudite s'efface ; du coin de sa cellule émane une lumière, une sorte de grâce pure. Et lorsque le révérend retourne à sa table de travail, les lettres qu'il brûle d'écrire sont pour sa femme Jane, non pour son roi. Chaque soir, ce récit continue, Charles suit Corrag à travers les Highlands enneigés, sous les cascades où elle lave sa peau poussiéreuse des heures de chevauchée solitaire. Chaque soir, à travers ses lettres, il se rapproche de Corrag, la comprend, la regarde enfin et voit que son péché est son innocence et le bûcher qui l'attend le supplice d'un agneau. (Résumé de l'éditeur)
Mon amie Guixxx m'avait conseillé ce livre il y a un bon moment déjà. Je ne m'étais pas encore décidée à le commencer, à la fois attirée par le sujet, et il faut bien le dire, repoussée aussi. L'histoire d'un procès pour sorcellerie ne peut pas être glorieux, quand on sait le nombre de femmes innocentes qui ont péri par feu, ou par l'eau. Ce livre, c'est aussi l'histoire d'un massacre, celui de tout un clan, hommes, femmes et enfants, pour la simple raison qu'ils soutenaient le mauvais roi...
Mais le récit ne se résume pas qu'à cela, et dés les premières lignes, j'ai été transportée dans cette époque éloignée, dans ces paysages que je ne connais pas. Le récit, purement narratif, se déroule comme dans un rêve, même s'il ressemble davantage parfois à un cauchemar. Nous sommes entièrement immergés dans le récit que fait Corrag de sa vie : de son enfance avec sa mère jusqu'à ce qu'elle soir arrêtée, de sa fuite d'Angleterre, de son arrivée en Ecosse,... et des rencontres qui ont émaillé sa route, qu'elles soient humaines ou animales. La plume de Susan Fletcher est magnifique, entre poésie et sensibilité à fleur de peau : chaque phrase est un bijou, en particulier lorsqu'elle évoque les paysages des Highlands. Comme le Révérend Leslie en fait lui-même l’expérience face au récit de Corrag, nous imaginons sans peine les descriptions qu'elle nous fait.
On en oublie presque le côté historique de ce roman. Car l'histoire s'inspire au départ de faits réels. L'histoire de Corrag, brodée autour, est un prétexte pour nous la raconter. Mais ce contexte historique sait souvent se faire oublier. Car nous vivons de toute notre âme la vie de Corrag. On partage ses émotions, ses peines, bien plus nombreuses que ses joies. Souvent je me suis sentie à l'unisson de ce qu'elle pensait ou ressentait. Le même besoin d'espace, de liberté. La même envie de se retrouver loin de toute civilisation hystérique et pétrie de préjugés. J'avais l'impression que le livre parlait à mon âme profonde... Je ne sais pas si tout le monde ressent la même chose face à cette lecture, mais pour moi, c'était presque ensorcelant.
Deux semaines après la lecture de ce roman, il m'habite toujours. Émouvant de vérité, il nous fait partager des émotions si fortes, éveille des images si puissantes, qu'on ne peut pas l'oublier sitôt la dernière page tournée. Et c'est bien difficile de vous faire partager mon enthousiasme pour un livre, qui se ressent, qui se vit, davantage qu'il ne se lit. Un coup de coeur vraiment, qui me donne envie de découvrir les autres livres de l'auteur !
Par une claire nuit de gel, alors qu'on racontait que tous les loups avaient disparu, j'en ai entendu un qui hurlait du côté de Bidean nam Bian. C'était un cri tellement long et triste que j'ai fermé les yeux en l'entendant. Il pleurait sa propre fin, je crois, ou la nôtre, comme s'il savait.
Les animaux n’ont pas gueuse ou sorcière en tête. Voilà pourquoi ils sont tellement raisonnables et dignes, ils voient seulement si on les traite bien ou mal. C’est comme ça que nous devrions être tous.
Tout ce que j'aimais m'entourait, rivières, rochers. Les bêtes. Les bruits du vent. Et je leur en étais reconnaissante. J'étais reconnaissante, car parmi eux je pouvais guérir les blessures en moi, les pertes, le chagrin. Ce que mon âme avait de meurtri, je pouvais le soigner et le nourrir dans ma cabane, ou sur les hauteurs, et qui en fait autant? De nos jours, qui prend le temps de soigner son âme?
Commentaires
Ah, ce bouquin est franchement génial, on est d'accord, je l'ai lu à sa sortie :)
Faut que je note la référence dans un coin, ça a l'air chouette comme texte ^^
C'est vraiment un très beau texte Vert, laisse toi tenter ! :)