La dame du manoir de Wildfell Hall - Anne Brontë
Par Yume le vendredi 22 août 2014, 10:12 - Autres - Lien permanent
L'arrivée d'Helen Graham, jeune veuve, au manoir de Wildfell Hall avec son enfant, excite la curiosité des habitants d'un petit village d'Angleterre. Sa vie retirée, ses manières réservées, le mystère de son origine, font naître de nombreuses rumeurs. Belle et mystérieuse, elle refuse de nouer tout contact avec ses voisins. Quel secret peut-elle bien cacher? Gilbert Markham, n'est pas insensible au charme de la jeune femme et une certaine amitié commence même entre eux... Mais les événements se précipitent, et Helen révèle son passé à Gilbert, en lui confiant son journal intime... Le jeune homme y découvre les espoirs d'une jeune femme en âge de se marier. Innocente et ignorante, elle tombe amoureuse d'Arthur Huntington, séduisant et frivole. Malgré les conseils de sa tante, elle l'épouse. Forte de sa foi, elle est sûre de pouvoir redresser les défauts qu'elle découvre petit à petit en son mari. Elle s'adonne à son rôle d'épouse avec abnégation et dévotion, mais Arthur Huntington se révèle bientôt un homme alcoolique, jaloux, égoïste et colérique. Passant de longs mois de débauche à Londres, il laisse sa femme seule dans leur demeure. La vie d'Helen se transforme peu à peu en cauchemar. Essayant de ramener son mari à la raison, elle obtient l'inverse : aversion, humiliation et mauvais traitements, jusqu'à être trompée sous son propre toit. Voulant à tout prix préserver l'innocence de son petit garçon, elle décide de quitter le foyer...
Après avoir lu les oeuvres de ses soeurs Charlotte (dont j'aime infiniment Jane Eyre) et Emily (après l'avoir lu deux fois, les Hauts de Hurlevent ne m'émeuvent toujours pas), je me penche enfin sur la prose d'Anne. Moins connue que le reste de la fratrie, son style est pourtant tout aussi remarquable. La Dame du manoir de Wildfell Hall (aussi nommée La recluse de Wildfell Hall selon les traductions), a une forme très particulière qui enchâsse des récits différents sur la forme, les narrateurs, et même le temps. C'est très surprenant mais Anne Brontë excite encore plus notre curiosité ! Le livre s'ouvre d'abord sur le récit de Gilbert Markham, sous la forme d'une (très !) longue lettre à un destinataire que l'on ne connaîtra que très tard. Dans ce récit est ensuite imbriqué le journal intime d'Helen Huntington, que l'on connaît au début de l'histoire sous le nom d'Helen Graham.
Ce roman, d'une grande finesse psychologique, m'étonne autant que ceux de ces soeurs. Comment ces femmes, presque retirées du monde, peuvent-elles avoir développé un regard si acéré sur la société du 19ème siècle et ses travers? Comment Anne Brontë peut-elle brosser avec tant de précision ce portrait de femme opprimée par le mariage? L'évolution des sentiments d'Helen à travers son journal est très progressive, elle mûrit peu à peu. De la tendresse des premières semaines, succède la colère et la haine, et pourtant, la jeune femme refuse de se laisser piétiner. En Angleterre, comme ailleurs en Europe au XIXème siècle, les femmes dépendent entièrement de leur mari, et la décision d'Helen de se dresser contre son mari et de le quitter, prouve sa volonté de lutter pour ce qu'elle croit juste. Elle n'est arrivée à cette décision que tardivement, et si ce n'était pour son fils, elle serait sûrement restée auprès d'Arthur...
Le livre a fait beaucoup de bruit à sa parution. Braver les conventions du mariage et parler de l'alcoolisme était vraiment d'une grande modernité. A travers ce roman, Anne semble moins romanesque que ses soeurs, et beaucoup plus engagée. L'histoire n'est pourtant pas dénuée de romantisme, et les rebondissements de l'intrigue ne m'ont pas fait lâcher le livre jusqu'à la fin. La construction du livre montre également les qualités littéraires indéniables de l'auteur. Sa plume, fine et vive, est très agréable à lire. Si ce n'étaient les fautes de frappe qui parsèment le livre, ma lecture aurait été parfaite ! (et la préface, qui révèle la plus grosse partie de l'histoire aussi, merci pour le suspens). Ce roman est une très belle découverte, un bijou de la littérature anglaise qui gagnerait à être connu davantage.
Commentaires
Ah c'est cool, y'a pas que moi qui suit passée à côté des Hauts de Hurlevent... Faudrait que je lise celui-là un jour, comme ça j'en aurais lu un de chaque soeur ^^.
C'est exactement ce que je me suis dit, on connaît beaucoup les autres soeurs, ce qui est plutôt dommage !