Le rêve du renard

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vendredi 15 mai 2015

Morwenna - Jo Walton

COUV_morwenna.inddMorwenna Phelps, qui préfère qu’on l’appelle Mori, a eu un terrible accident de voiture qui l’a laissée handicapée et l’a privée à jamais de sa soeur jumelle. Comme elle soupçonne sa mère, passionnée de magie noire et à demi folle, d’être à l’origine de ce drame, elle s’enfuit. Son père, dont elle ignore tout, la recueille et la place dans un pensionnat chic. L’amour des livres mais aussi leur magie vont permettre à Mori de supporter le quotidien dans cette institution stricte. Mais elle ne sera vraiment libre que quand elle aura percé tous les secrets qui entourent son étrange famille. (Résumé de l'éditeur)

Après que toute la blogosphère ait lu, et aimé Morwenna, je craque enfin. J'avais peur d'être déçue par toute cette effervescence autour du roman. Fin du suspens : pas du tout.

Nous découvrons Morwenna grâce à son journal intime, dans lequel elle écrit presque tous les jours. On y découvre peu à peu son passé, mais ce sont surtout son quotidien dans sa nouvelle école huppée anglaise, et son parcours de lectrice qui occuperont les pages. Pas vraiment d'action donc au rendez-vous, mais cela ne m'a jamais gênée dans un roman. Au contraire, cela contribue à l'atmosphère étrange et particulière du récit. Je me suis identifiée très vite à Morwenna, qui bien qu'ayant des idées très arrêtées (ce que je ne pense pas avoir eu au même âge...), a une boulimie de lecture que j'ai déjà vécue adolescente. Singulière, solitaire, on s'attache également fortement à elle, sans pour autant verser dans le pathos à cause de la perte de sa jumelle et de son handicap.

Cette histoire pourrait donc être très banale. Mais Morwenna voit des fées. Et est persuadée que sa mère est une sorcière. Cela ajoute une dimension fantastique, comme une impression d'être entre deux mondes par laquelle le lecteur se laissera porter, faisant le choix ou non de la croire. Mais ce qui viendra surtout nous intéresser, en tant que lecteur (et accessoirement lecteur de SFF !), ce sont les lectures de Morwenna. Sur son temps libre, qu'elle a en abondance, la jeune fille dévore les romans de science-fiction. Son amour de la lecture est communicatif, et on découvre avec plaisir ses comptes-rendus de lecture, assez courts pour ne pas être lassants. Si j'ai parfois été perdue dans toutes les références qu'elle cite, c'est surtout de la frustration pour toutes ces oeuvres que je n'ai pas encore lues que j'ai ressenti !

Si le récit de la vie de Morwenna semble peu palpitant, la combinaison dans un journal intime, d'une situation familiale complexe et de préférences de lecture que le lecteur partage, crée un ensemble captivant. Jo Walton a su trouver le ton juste avec son héroïne, on se sent proche d'elle, partageant ses pensées et ses convictions. Par sa volonté de ne pas vouloir entrer dans un moule, elle est attachante et son amour des livres, touchant. Une très belle lecture, tout en sensibilité, poétique et douce-amère.

Le prêt entre bibliothèques est une des merveilles du monde et une gloire de la civilisation. (la bibliothécaire en moi n'a pas pu s'empêcher de sourire en lisant ça ! Si elle savait aujourd'hui....)

vendredi 3 avril 2015

Au carrefour des étoiles - Clifford D. Simak

carrefour_etoiles.jpgEtrange demeure que cette ferme Wallace, qui se dresse sur une falaise escarpée du Wisconsin. Enoch Wallace, son propriétaire, vit là, de toute éternité semble-t-il... Depuis bientôt deux ans, Claude Lewis - agent des Renseignements déguisé en ramasseur de gingseng - enquête et tourne autour de la ferme... (Résumé de l'éditeur)

La plume de Simak, que ce soit dans Demain les chiens, ou Voisins d'ailleurs, m'avait charmée par son optimisme dans l'humanité ou les contacts extra-terrestres. Les thèmes chers à l'auteur se retrouvent une fois encore dans ce roman, où le cadre bucolique, autre caractéristique représentative du style de Simak, est prépondérant.

L'intrigue prend son temps pour se mettre en place, l'auteur multipliant les points de vue et les flash-back. Le mystère ne plane pourtant pas longtemps, et l'on apprend pourquoi Enoch Wallace, né plus de cent ans plus tôt et rescapé de la guerre de Sécession, est toujours vivant, jeune, et reclus dans la ferme familiale. Cette dernière est en fait une station stellaire, créée sur Terre comme relais pour permettre des voyages spatiaux plus rapides pour les habitants de la Galaxie. Enoch en est le gardien, et pour garder le secret de son activité, il s'est coupé du monde. Qui comprendrait que le temps ne passe pour lui que s'il met un pied en dehors de la station?

Nous vivons la vie de Wallace et ses souvenirs par le biais des journaux intimes qu'il tient, retraçant ses rencontres avec les voyageurs transitant par la station (passionnantes ces rencontres, et les descriptions d'extra-terrestres encore plus !). Reclus mais curieux, il prend le pouls du monde extérieur grâce aux journaux et revues scientifiques. Mais ces contacts avec d'autres races, plus ouvertes, avancées et intelligentes que les terriens, ont stimulé sa propre intelligence et sa perception du monde.

Et lorsque les évènements le rattrappent, Enoch est partagé entre sa fascination pour les peuples extra-terrestres qui ont élevé l'égalité et la fraternité comme principe fondamental, et sa loyauté pour ses congénères humains empêtrés dans des problèmes politiques qui présagent une 3ème guerre mondiale...

Simak livre ici encore un roman d'une grande lucidité, mâtiné à la fois d'amertume et de poésie. Je ne peux pas vous en exprimer toute la richesse, qui passe par la confiance et l'espoir, mais aussi la perte et le sacrifice. Pour un livre écrit dans les années 60, il est d'une actualité encore très forte, et parle de l'avenir de l'humanité avec beaucoup de modernité. Une très belle oeuvre de science-fiction.

mercredi 11 février 2015

Anansi Boys - Neil Gaiman

anansiboys.jpgLe père de Gros Charlie n'était pas ordinaire : il était Anansi, le Dieu Araignée, l'esprit de rébellion, un dieu filou capable de renverser l'ordre social, de créer une fortune à partir de rien et de défier le diable... Un héritage bien encombrant ! Une mythologie moderne où l'on trouve une sombre prophétie, des désordres familiaux, des déceptions mystiques, et des oiseaux tueur. Sans oublier un citron vert. (Résumé de l'éditeur)

Je trouve ce roman de la longue bibliographie de Neil Gaiman un peu méconnu, et pourtant je me suis autant éclatée qu'avec De Bons présages, pour le côté déjanté. Se passant dans le même univers qu'American Gods, Anansi Boys a pourtant peu de chose en commun avec lui. Difficile d'ailleurs de décrire ce roman, que l'auteur définit lui-même comme "une épopée magico-horrifico thrillo-fantastico familiale, même si cela exclut son côté polar et tout son aspect culinaire". Oui, tout ça, et c'est parfaitement résumé.

Sans entrer donc dans le détail de l'histoire, ce roman nous présente Gros Charlie Nancy (en fait, c'est Charlie tout court, mais les surnoms, ça reste...). Charlie découvre le jour de l'enterrement de son père, que celui-ci était en fait le dieu Anansi, le Dieu Araignée, propriétaire de toutes les histoires. Et comme une nouvelle n'arrive jamais seule, il apprend également qu'il a un frère, Mygal. Et quand ce frère débarque, après une discussion fortuite avec une araignée, la vie de Charlie va échapper à tout contrôle...

On voit une fois encore que Neil Gaiman s'est éclaté à écrire ce roman. Entre mythes et catastrophes, ça part dans tous les sens. L'humour teinté d'une ironie parfois mordante, n'empêche pas d'aborder des sujets plus sérieux. Les personnages, typiquement gaimaniens, sont drôles et caricaturaux à souhait. Ce Anansi Boys est une lecture légère et passionnante, plus accessible sûrement que d'autres de l'auteur. Je n'en jette pas plus dans le dithyrambique, vous aurez compris l'idée générale... Tout ça pour dire, lisez du Neil Gaiman, ça fait du bien !

Peut-être n'est-il pas inutile de rappeler que dans l'univers de Gros Charlie, les femmes ne se manifestaient pas spontanément. Il leur fallait être présenté ; il fallait réunir le courage de leur parler ; ensuite, il fallait trouver un sujet de conversation et, une fois ces sommets gravis, d'autres restaient à escalader. Il fallait oser leur demander si elles étaient libres samedi soir, et, lorsqu'on s'y résolvait, la plupart d'entre elles, ce soir-là, devaient justement se laver les cheveux, ou bien rédiger leur journal intime, ou encore s'occuper de leur cacatoès, voire tout simplement rester près du téléphone à attendre l'appel d'un autre homme.

jeudi 5 février 2015

La Planète Géante - Jack Vance

planete_geante.jpgComme son nom l'indique, Planète géante est véritablement gigantesque. Sa gravité et son climat permettent aux hommes de s'y implanter, mais l'absence de métaux empêchent des sociétés technologiques de se développer. Sans aucun intérêt pour les autorités terriennes, la planète sert rapidement de débarras pour les tous les marginaux, les sectes, et les autres inadaptés de la Terre. Ils y trouvent une liberté totale, faite de violence, d’esclavage ou de tyrannie. Entre les combats, les trafics d'armes et les conditions de vie déplorables, la mortalité est extrêmement élevée. La petite enclave terrienne est impuissante à faire appliquer des lois, dans ce pays aux distances immenses. La Terre a bien envoyé des commissions sur la planète afin de remédier aux différents problèmes, mais toutes sont des échecs.

La dernière commission en date, a également bien des difficultés à mener sa mission. Après l'attentat de leur vaisseau, un membre jouant double-jeu s'acharne à mettre des bâtons dans les roues de ses collègues, et les élimine les uns après les autres... Obligés de rejoindre à pied l'enclave, à 65 000 kilomètres de là, les membres de la commission vont se retrouver confrontés brutalement à ces peuples si différents, livrés à eux-mêmes depuis des siècles.

J'ai mis un peu de temps à finir ces 288 pages. Pourtant le texte n'est pas vieillot, comme je le craignais, malgré sa parution initiale en 1957. Le point fort de ce roman, c'est cette planète fascinante, peuplée d'humains complément barrés ou névrosés. Mais malheureusement plusieurs points ont diminué mon plaisir de lecture. Dés les premières lignes, il est difficile de différencier les personnages, à part les deux principaux, tant ils sont effacés et interchangeables. Au niveau du propos, c'est également plutôt simple. Malgré un contexte de départ intéressant, on peut regretter qu'il ne soit pas exploité plus en profondeur. On n'y trouve pas de réelle réflexion, à part dans les toutes dernières pages, qui m'ont ramenée immédiatement aux problématiques du monde de Majipoor de Silverberg (qui se serait d'ailleurs inspiré de ce roman...).

Au final, si l'histoire trop linéaire ne laisse pas un souvenir impérissable, les rencontres qui émaillent ce périple sur Planète Géante, laissent des impressions exotiques plus marquantes. Je n'ai cependant pas été transportée comme dans d'autres planet opera. Il ne me reste plus qu'à m'essayer aux autres cycles de l'auteur, comme Durdane ou Tschai, plus récents, donc sûrement plus aboutis.

mardi 28 octobre 2014

Terre d'élection - Anne McCaffrey

terre_election.jpgLes Eosis, conquérants de la Terre, ont déporté des prisonniers sur une planète inhabitée : Botany. D'abord ramenés à l'âge de pierre, les "débarqués" ont renoncé à la vie communautaire dans des grottes, construisant des demeures individuelles où des couples se constituent, et où naissent des enfants qui seront la deuxième génération des hommes libres. Mais la furieuse attaque des Eosis les pousse à réaliser la troisième partie de leur plan : l'anéantissement des agresseurs. Au cours de leurs incursions sur la Terre et sur Barevi, Zainal, le seul Catteni de la colonie, a identifié un réseau de résistance parmi ses compatriotes. Il prend contact avec eux. Les Eosis sont des entités insubstancielles qui, pour se manifester, entrent dans le corps d'un Catteni "élu", dont la personnalité est absorbée par celle de l'Eosi "récepteur". Zainal n'a pas supporté cette perspective. Pourtant, c'est peut-être là qu'il faut chercher le talon d'Achille des conquérants. (Résumé de l'éditeur)

Les colons de Botany ont fait beaucoup de chemin. Ils cherchent à présent à libérer la Terre, et Zainal, à libérer Catten, de la domination des Eosis. Projet ambitieux s'il en est, et dangereux. Ce tome s'attarde donc sur les plans pour capturer des vaisseaux, percer la sécurité des planètes ou résident les Eosis, et trouver une arme qui puisse les tuer. Si j'avais été assez enthousiasmée par les découvertes sur la race des Fermiers, et sur celle des Eosis dans le tome précédent, il n'y en a eu ici pas de nouvelles. J'ai donc été un peu déçue qu'Anne McCaffrey ne creuse pas davantage ses idées...

Entraide et lutte contre le racisme sont encore des thèmes centraux ici, au milieu de l'esclavage et des lavages de cerveau. Si l'écriture reste fluide et fraîche, les thèmes ne sont pas très nouveaux. Pire, les erreurs de traduction et les problèmes de mise en page, présents dans les tomes précédents également, rendent la lecture un peu difficile parfois. Et si j'ai apprécié ma lecture dans l'ensemble, je ne peux pas m'empêcher de penser que ces trois tomes que je viens de lire auraient très bien pu n'être qu'un seul. L'intrigue est un peu trop diluée... Il reste d'ailleurs encore un tome à cette série, mais étant donné son prix en occasion, et sa quatrième de couverture, je pense que je vais m'arrêter là. Cette série, si ce n'est pas la meilleure de l'auteur, développe des thèmes intéressants, mais un peu trop répétitifs...

Pour les fans de l'auteure, cette série est donc plutôt agréable à lire, mais je continuerai de conseiller Pern et son incroyable univers à tout ceux qui souhaitent découvrir l'oeuvre de cette grande dame.

mercredi 22 octobre 2014

Dernières nouvelles de Majipoor - Robert Silverberg

majipoor_nouvelles.jpgJ'ai découvert Majipoor il y a plusieurs années maintenant, et ce monde reste dans ma mémoire comme un concentré d'exotisme vraiment dépaysant. La parution de ce recueil de nouvelles me permet de renouer avec bonheur avec cette planète multi-culturelle et aux thématiques complexes. Pour ceux qui ne connaissent cependant pas cet univers, cela peut être une très bonne porte d'entrée, puisque l'auteur distille avec beaucoup de naturel tous les détails qui permettent de comprendre Majipoor. Vous tomberez à coup sûr sous le charme de cette planète à l'histoire millénaire, son peuple autochtone Piurivar à la fois rebelle et mystérieux, ses émigrants extra-terrestres aussi exotiques que surprenants, sa politique bicéphale et labyrinthique, sans oublier sa magie des rêves...

Le Bout du chemin revient sur le personnage de Stiamot, avant qu'il devienne ce Coronal célèbre pour sa guerre contre le peuple des métamorphes, et leur annexion dans des réserves. Nous découvrons ici sa première rencontre avec ce peuple. A l'époque, encore indécis et pacifiste, il pense qu'une cohabitation est possible... Ou la genèse des idées politiques...

Le Livre des Changements. Un fils cadet de Coronal passe oisivement sa vie sur le Mont du Château. Jusqu'à ce que, voulant insuffler du changement dans sa vie, il parte explorer les terres environnantes, à la découverte des merveilles de Majipoor. Mais en chemin, il est capturé par un seigneur local. Enfermé dans sa cellule, ce poète amateur va être pris d'une inspiration formidable. Les souvenirs des Anciens Pontifes le visitent, et lui dictent une histoire de Majipoor qui fera date pendant des siècles.

La Tombe du Pontife Dvorn. Le tout premier Pontife est une figure presque mythique sur Majipoor. A l'origine de l'organisation politique de la planète en place depuis des millénaires, il est un symbole. Alors quand une ville pense avoir découvert sa tombe, des archéologues passionnés entament des fouilles. Mais intérêts historiques et commerciaux entrent rapidement en conflit...

L’Apprenti en sorcellerie. Un jeune homme passionné de magie entre en apprentissage. Son professeur se trouve être une très belle, et très froide, jeune femme. Tombant immédiatement amoureux d'elle, il va devoir maîtriser ses élans, sous peine d'être remercié... Dépourvue de tout contexte historique ou politique, cette nouvelle distille pourtant une ambiance vraiment particulière, mystérieuse et feutrée.

Heures sombres au Marché de minuit. Nulle trace de politique dans cette nouvelle encore, mais un humour plutôt cocasse ! Alors que l'intêret pour la magie est sur le déclin sur Majipoor, deux sorciers tentent de maintenir leur boutique à flot. Autrefois très à la mode, la préparation de potions et autres tours de magie, est maintenant presque ringarde, malgré leur efficacité. Aussi, lorsqu'un jeune prince pousse la porte de leur échoppe pour acheter un philtre d'amour, les deux associés oublient toute prudence au profit de cette vente très lucrative...

De la manière de tisser des sorts à Sippulgar est sûrement la nouvelle la plus exotique de ce recueil. Elle retrace le voyage d'un marchand, à la recherche de son beau-frère, mystérieusement disparu. Il retrouve sa trace à Sippulgar, ville cosmopolite qui a la particularité d'abriter un nombre de temples et de religions incroyable. Et s'il avait trempé dans une arnaque louche touchant à la religion?

Le Septième Sanctuaire. Cette nouvelle n'est pas une découverte, puisqu'elle est précédemment parue dans l'anthologie Légendes. On y retrouve le célèbre Valentin, devenu Pontife, enquêtant sur la mort d'un archéologue Piurivar. Sur le site de fouilles de la plus ancienne et sacrée cité Piurivar, de sombres souvenirs semblent se réveiller... A la fois lieu maudit et sanctuaire, une antique légende plane sur la cité en ruine. Le décès du métamorphe compromet de plus la coopération que le Pontife avait mis sur pied pour tenter de combler le fossé entre humains et Piurivars. Ce crime pourrait déclencher une nouvelle guerre...

lundi 20 octobre 2014

Terre de défi - Anne McCaffrey

terre_defi.jpegLes colons de la planète Botany n'ont pas oublié leur malédiction originelle : sur ce monde pastoral, ils ont été déportés de force par les Cattenis, conquérants de la Terre et de bien d'autres planètes. Mais les Cattenis sont en réalité les esclaves des Eosis, ces entités insubstantielles (ou "Mentat") qui, pour se manifester, entrent dans le corps d'un Catteni "élu", dont la personnalité est absorbée par celle de l'Eosi "récepteur". Or, Zainal, un Catteni débarqué avec les prisonniers, était un élu des Eosis. Sachant ce qui l'attend chez lui, il refuse d'y retourner. Mais son frère, élu à sa place, en conçoit tant de haine qu'il la transmet au mentat Ix, venu habiter son corps. Et Ix prêche la guerre contre Botany. Les colons ne restent pas inactifs : ils capturent un astronef, ils lancent une capsule d'alarme qui atterrit chez les Fermiers. La bataille s'annonce mémorable. (Résume de l'éditeur)

Suite directe de Terre de liberté, Terre de défi nous offre une histoire intéressante. Passées les premières épreuves de survie, la colonie commence à s'établir de façon durable. Les détails de gestion d'une population de près de 9000 personnes passent un peu plus au second plan, au profit d'une intrigue plus développée, au niveau planétaire, comme extra-planétaire. Nous découvrons la race des Eosis, d'étranges créatures intellectuellement supérieures, qui ont besoin d'un hôte Catteni pour prendre corps. L'hôte est comme parasité, vidé de sa substance, et physiquement déformé par son nouveau possesseur. Cette race pas commode domine plusieurs galaxies, et la résistance sur Terre et Botany les a passablement mis en colère... D'autre part, sur Botany, le mystère des machines agricoles auto-suffisantes semble sur le point d'être découvert. L'étrange race à l'origine de la mise en culture de la planète se révèle à ses nouveaux habitants, et semble être à la fois paisible, non-violente, et d'une technologie hautement avancée.

Ce second tome est donc sous le signe de nombreuses découvertes et révélations, qui rythment le récit. L'action part dans plusieurs directions, et c'est avec plaisir qu'on suit les captures de vaisseaux ennemis, les sorties spatiales et autres tentatives de contacts extra-terrestres. L'histoire est toujours aussi réaliste, même si je la trouve parfois un petit peu trop utopiste pour être crédible. L'idée d'un monde pastoral, où plusieurs races pourraient vivre ensemble en harmonie... L'optimisme d'Anne McCaffrey, même s'il est nuancé par certains problèmes (gourvernance, racisme, technologie, troc...), ne me convainc pas tout à fait.

Comme dans le roman précédent, on sent indéniablement la touche féminine d'Anne McCaffrey. Cela pourra sûrement rebuter les lecteurs masculins de lire des passages entiers sur l'ameublement intérieur et la mise en place de crèches, mais cela apporte une touche de fraîcheur au milieu de considérations plus militaires. Le décalage catalogue Ikea d'un côté, et voyage en astronef de l'autre est plutôt rigolo. C'est ça aussi, le charme de la prose de cette auteure !

Terre de défi est plus équilibré au niveau de l'intrigue et utilise avec succès les bases posées dans Terre de liberté. J'espère que la suite promet plus d'action encore !

mardi 7 octobre 2014

Aux confins de l'étrange - Connie Willis

confins-de-letrange.jpegAprès avoir lu tous les romans de Connie Willis, je m'attaque cette fois-ci à ses nouvelles. Heureusement que ma bibliothèque le gardait encore sur ses étagères, car il est apparemment introuvable dans le commerce aujourd'hui, ou alors à prix d'or.

Comme le nom de ce recueil l'indique, Connie Willis navigue dans les onze nouvelles de ce recueil entre fantastique et étrange, vie quotidienne et humour. Les réunions Tupperware côtoient la physique quantique, et on découvre Connie Willis plus finement qu'à travers ses romans. Pas de SF pure et dure ici donc, mais des sentiments plus diffus, ou on passe progressivement de l'autre côté du miroir.

Le dernier des Winnebago nous emmène dans un futur très mélancolique, où les gens sont nostalgiques de la mort des chiens...
Même sa Majesté se moque avec beaucoup d'humour et de causticité des féministes, et interroge en particulier le lectorat féminin. Et si les cycles mentruels et ses désagréments disparaissaient purement et simplement grâce à un médicament?
Le Rayon de Schwarzschild nous immèrge au coeur des tranchées de la Première Guerre Mondiale, dans un récit confus et chaotique.
J'ai vraiment ri (jaune) en lisant Ado, qui pourrait se transposer aisément de nos jours... Ou comment une prof de français se retrouve à expurger les pièces de Shakespeare de tout ce qui pourrait choquer quelqu'un... Forcément, il ne reste plus grand chose.
Pogrom spatial est sûrement ma nouvelle préférée du recueil, avec son univers complétement loufoque, et son extra-terrestre farfelu. Quiproquos en cascades et personnages hilarants pour une nouvelle très rythmée.
Conte d'hiver trouve un écho aux polémiques sur la paternité des oeuvres de Shakespeare.
Hasard est une nouvelle très étrange, mêlant souvenirs et réalité, vraiment triste.
A la fin du Crétacé ou l'avenir du département de paléontologie d'une université, et ses problèmes insolubles d'administration, de coupes budgétaires et de gestion de places de parking...
Temps mort interroge sur les origines du temps, et de l'amour, avec un léger détour par les voyages dans le temps, un sujet que j'adore chez Connie Willis.
Rick m'a rappellé avec beaucoup de la plaisir ses romans sur le black-out à Londres, et ses habitants s'organisant dans une résistance passive pleine d'humanité et de courage. La chute m'a plutôt surprise, je ne m'attendais pas à ce thème, à ce moment-là, et à cette période-là (je n'en dirais pas plus !)
Au Rialto surfe entre références à la physique quantique et au cinéma, deux domaines où je suis clairement en manque de références. Je ne me suis donc sentie un peu perdue...

Connie Willis nous offre ici des nouvelles aux références multiples, dans des domaines vraiment très divers. En introduisant chaque nouvelle d'un court encart, on est plus à même de comprendre son inspiration et sa façon de penser, c'est passionnant. Même si je n'ai pas accroché à toutes ses nouvelles, elles ont toutes indéniablement un intêret, un "traitement" particulier, qui montrent l'aisance de l'auteure dans l'écriture. Une belle découverte.

mardi 30 septembre 2014

Terre de liberté - Anne McCaffrey

terre_liberte.jpgJe me suis attaquée à toutes les séries d'Anne McCaffrey, sauf celle-ci. C'est maintenant chose faite, avec le premier des 4 tomes qui composent le cycle des Hommes libres. L'auteur nous emmène cette fois-ci dans un univers vraiment intéressant. Nous découvrons la Terre écrasée par des envahisseurs extraterrestres, les Cattenis. Les humains sont déportés sur des planètes lointaines pour y être vendus comme esclaves, ainsi que d'autres races extraterrestres tombées sous leur joug. Notre ego en prend un coup au passage, mais ça change ! Les Cattenis ont également l'habitude de débarquer sur des planètes de type terrestre les prisonniers, avec le strict nécessaire pour leur survie, où leur fonction est de tester les possibilités d'adaptation, au profit des envahisseurs, bien sûr.

C'est dans cette situation que nous découvrons Kris, jeune femme volontaire, débarquée sur la planète Botany. Les Cattenis n'y ont apparemment pas décelé tous les dangers, et les colons forcés doivent faire face à davantage de difficultés que celles de leur simple survie. Une technologie étrange est en effet déjà en place sur la planète, et d'affreuses bestioles dévorent tout ce qui bouge à la nuit tombée...

Comme d'habitude, Anne McCaffrey crée un univers vraiment intéressant, qui pose des problèmes qui incitent à la réflexion. Au delà de la difficile survie, la cohabitation de plusieurs races extraterrestres est au coeur de l'histoire (la cohabitation homme/femme également, ah, la promiscuité !). Racisme et intolérance ne manquent pas d'éclore, d'autant plus qu'un membre de la race des Cattenis a été débarqué avec les colons. Nous suivons également les progrès d'adaptation des colons : recherche de métaux, de nourriture, et autres confection d'outils indispensables. Il y a beaucoup de descriptions de la vie quotidienne, voire même trop parfois, et malgré quelques problématiques plus sérieuses, il ne se passe pas grand chose pour l'instant. Si, forcément, notre belle et fougueuse Kris va tomber amoureuse du renégat Catteni, sinon, ça ne serait pas drôle !

Ce premier tome malgré quelques longueurs m'a tout de même convaincue. Il y a de bonnes bases à explorer. Le mystère autour de la planète reste entier, et il semblerait que la Terre soit entrée en résistance contre les Cattenis. C'est une lecture plaisante, plutôt originale, qui revisite même le personnage du militaire macho (si si).

mardi 2 septembre 2014

Gigante : Au nom du père - Pierre Bordage

gigante2.jpgLe jeune ethnolinguiste Zaslo Merticant débarque sur Gigante depuis la lointaine Azadée, en quête des mythiques géants dont une expédition aurait exhumé les squelettes des siècles plus tôt. Dans le but, également, de tuer son père, qui l’a abandonné avant même sa naissance… Mais comment exercer une vengeance sur une planète dix-huit mille fois plus volumineuse que la Terre, où tout voyage est à sens unique ? Comment même voyager sur un monde parcouru de sphères incandescentes et d’orages électriques d’une rare violence ? C’est l’histoire d’un apprentissage, celui d’un monde aux colères destructrices. Il passe par le cheminement de Zaslo vers l’apaisement intérieur jus qu’à la découverte de son rôle fondamental pour l’avenir des peuples humains disséminés sur Gigante. (Résumé de l'éditeur)

Alain Grousset et Pierre Bordage ont imaginé ensemble la planète Gigante. J'avais déjà fait sa connaissance dans Au nom du fils, écrit par Alain Grousset, pour un public jeunesse. Je me penche ici enfin sur son pendant, se passant une dizaine d'années plus tôt. Comme cela m'arrive souvent, j'ai lu ce diptyque dans le désordre... J'ai découvert la vie du père, avant celle de son fils. Ce n'est pas si grave en soi, mais je me suis privée d'une partie du suspens. L'histoire des romans repose sur la haine d'un jeune homme, Zaslo, pour son père. Ce dernier, a quitté sa planète sur un coup de tête, pour rejoindre Gigante et une civilisation mythique de géants. Mais il ne savait pas qu'il laissait un fils derrière lui. Un fils qui arriverait bien avant lui sur Gigante, les progrès technologiques ayant considérablement diminué la durée des voyages spatiaux. Ce qui fait que si le père est toujours en route, en sommeil cryogénique, son fils parti des années plus tard est arrivé avant lui...

Comme dans ma précédente lecture, j'ai été complètement fascinée par cette planète où les voyages se comptent en mois, en années, voire en générations. Une planète où des peuples peuvent vivre en autarcie complète, avec leurs croyances et leurs traditions. Une planète aussi immense qu'elle est dangereuse, comme le prouvent les manifestations électriques destructrices qui dévastent tout sur leur passage. Une planète où les colons doivent s'habituer à une nouvelle rotation du soleil, qui engendre des journées et des nuits de 30 jours. Si c'était principalement la découverte de cet univers que j'avais apprécié dans Au nom du fils, ici l'histoire m'a également passionnée. Car on découvre ici une personnalité bien plus fouillée et complexe. Je ne peux pas vous en dire plus sans spoiler l'histoire, mais la vengeance qui animait Zaslo, va au final devenir bien secondaire. Car le jeune homme va devoir partir à la recherche de lui-même autant qu'à la découverte de ces mythiques géants...

Si j'ai vraiment beaucoup aimé l'écriture fluide, les chapitres courts et rythmés, j'ai peut-être un peu regretté certaines ficelles scénaristiques un peu faciles, qui ne m'ont pas fait trembler bien longtemps pour les personnages. Mais on les oublie assez vite, face aux descriptions de paysages à couper le souffle. Au final, ce livre est un condensé d'exotisme et d'humanité, où il semblerait que la planète soit le véritable personnage principal. Une belle découverte.

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